Son approche Dogmatique vs. Scientifique
Entre un thé et une eau minérale, à bord d’une péniche sur la Seine, je vivais un moment donquichottesque…
…en tentant de faire vaciller la grande certitude numérique du 80/20, cette loi proclamée avec une ferveur quasi religieuse par une large majorité de coachs autoproclamés sur internet. Le ton est donné : si 99 % des coachs affirment que 80 % de l’entraînement doit se faire en endurance fondamentale, alors il ne saurait y avoir de débat. Ce n’est plus une hypothèse d’entraînement, c’est un axiome. Une vérité. LA vérité.
Définition de l’endurance fondamentale selon les coachs
Les coachs définissent l’endurance fondamentale comme une allure de course lente, permettant de maintenir un effort prolongé sans essoufflement. Elle se caractérise par une fréquence cardiaque située entre 60 et 75 % de la fréquence cardiaque maximale (FCM), ou environ 65 % de la vitesse maximale aérobie (VMA). À cette intensité, le coureur est en aisance respiratoire, capable de tenir une conversation sans difficulté. (Décathlon Conseils Sport, i-Run, Lucile Woodward).
La méthode 80/20 : justification par les coachs :
La méthode 80/20, ou entraînement polarisé, consiste à consacrer 80 % du volume d’entraînement à faible intensité (endurance fondamentale) et 20 % à haute intensité. Cette approche est justifiée par plusieurs arguments :(Lucile Woodward)
- Amélioration des performances : En construisant une base aérobie solide, les coureurs peuvent améliorer leur endurance, leur vitesse et leur capacité à courir de longues distances. (Runnea)
- Réduction du risque de blessures : Les efforts moins intenses nécessitent moins de récupération, réduisant ainsi le stress sur les muscles et les articulations. (Coureur Du Dimanche)
- Prévention du surentraînement : En minimisant le stress physique et mental, cette méthode permet d’être davantage reposé et prêt pour chaque séance. (Coureur Du Dimanche)
https://www.campus.coach/blog/ameliorer-son-endurance

Or, le simple fait que cette proportion circule avec une telle insistance, indépendamment des contextes individuels (âge, objectifs, antécédents, variabilité génétique, capacité de récupération, etc.), est justement le symptôme d’une dérive dogmatique.
Quand une méthode devient doctrine
Le principe de base du dogme est qu’il se soustrait à la falsifiabilité. On ne le discute plus, on l’enseigne. Ainsi, le ratio 80/20 — à l’origine issu d’analyses statistiques de profils d’élite dans des contextes très spécifiques — est devenu un modèle prescriptif universel, extrapolé sans nuance à tous les niveaux, du joggeur du dimanche au marathonien amateur.
Comme tout dogme, il fonctionne par autorité : « Les champions le font, donc vous devez le faire. »
Et par répétition : plus une idée est répétée, plus elle paraît vraie.
Le paradoxe de l’expertise populaire
Le web crée l’illusion d’un consensus scientifique là où il n’y a parfois que répétition de contenus identiques, recyclés, simplifiés à outrance. Ces pages de blog, vidéos YouTube ou posts Instagram citent souvent les mêmes références (Seiler, Maffetone), mais sans critique, sans contextualisation, sans actualisation.
C’est un paradoxe moderne : la démocratisation du savoir a conduit à une forme de conformisme algorithmique, où l’on est d’autant plus crédible qu’on dit la même chose que les autres. Or, l’entraînement ne se décrète pas à coups de pourcentages, mais se construit dans la rencontre dynamique entre un sujet et une stratégie évolutive.
Ce que dit vraiment la science (quand on la lit) (voici un article de référence de la société Américaine de Physiologie dont je suis membre de puis 20 ans : https://journals.physiology.org/doi/epdf/10.1152/physrev.00017.2022
La littérature scientifique sérieuse n’impose pas une loi unique du 80/20. Elle montre qu’une large proportion d’entraînement en intensité basse est favorable dans certains contextes, mais que cela dépend :
- de la discipline (trail, triathlon, 5 km, marathon, etc.),
- du niveau d’entraînement (débutant vs élite),
- des contraintes de récupération,
- de la capacité individuelle à tolérer la charge,
- et surtout… de l’objectif : performance ? santé ? longévité ? plaisir ? ou tout cela à la fois
D’ailleurs, plusieurs méta-analyses indiquent par exemple que des stratégies comme l’entraînement « pyramidal » ou « seuil centré » peuvent être aussi efficaces, voire supérieures, dans certains cas. La variabilité interindividuelle est une des premières lois de la physiologie… ignorée dans le discours dogmatique.
L’autorité algorithmique et la perte de complexité
Le succès du 80/20 s’explique aussi parce qu’il est facile à retenir, à vendre, à appliquer. Il répond au besoin humain de simplification : un chiffre, une règle, un repère. L’algorithme aime ce qui se partage vite.
Mais cette simplification est à double tranchant : elle efface la complexité adaptative du vivant et transforme le coaching en formule figée, parce que le coaching sportif est un métier qui doit se baser sur des connaissances pratiques ET théoriques. Les membres de l’ASEP en sont convaincus et je les en remercie de diffuser cet état d’esprit de CURIOSITE et d’honnêteté intellectuelle car, moi la première, continue à me remettre en question CHAQUE JOUR tout en avançant à coup d’hypothèses validées (ou non) par des expériences scientifiques que nous vous invitons à partager et à vivre !
Une fois cela dit il me faut vous proposer une autre façon de penser PAR VOUS-MEME en vous donnant une nouvelle façon moins dogmatique de construire votre endurance fondamentale :
On vous dit que l’endurance fondamentale vous permet d’augmenter votre VO2max par les effets suivants :
Les bénéfices de cette pratique incluent :
- Amélioration du système cardiovasculaire.
- Augmentation du nombre de capillaires et de mitochondries, favorisant une meilleure oxygénation des muscles.
- Utilisation accrue des lipides comme source d’énergie, épargnant les réserves de glycogène.
- Réduction du risque de blessures et amélioration de la récupération.
Le problème est qu’il vous sera impossible de courir un marathon en 3h45min (11,2 km/h de moyenne) en vous obligeant à courir à 9 km/h vitesse décrétée de votre endurance fondamentale (exemple véritable vécu à bord de cette péniche en sirotant mon thé Earl Grey au lait chaud : je sais, cela constitue un crime de lèse-majesté ! …le lait t chaud en plus) !
Il a terminé en 4h07 min à 10,2 km/h ce qui est déjà excellent pour un entraînement centré à 9 km/h : les 20% de fractionné autour de 90% de VMA ont donc été efficaces et les 80% ont surtout contribué à faire perdre 10% du poids de corps (8 kg) à ce coureur ce qui contribue à augmenter le VO2max relatif de …10% nonobstant les effets cardiorespiratoires et métaboliques.
En effet, le record précédent était de 4h27 minutes et on a bien une amélioration de 20 minutes soit 7,5% dû à la perte de poids et le reste est imputable aux effets des 20% de fractionnés. Finalement le rapport pénibilité/gain est rentable !
Oui s’il l’on, considère que le fractionné est pénible détestable donc redoutable comme je l’ai vécu moi-même face à ces séances de 4 fois 1000m à 90% de VMA et 20 fois 200m à 105% de VMA.
Non si l’on se dit que l’endurance qui est définit par la capacité de soutenir la plus haute fraction (%) de VO2max le plus longtemps possible, peut se gagner en réalisant des séries de 30s-30s à une intensité perçue comme étant « haute » alternée de récupération à intensité perçue comme étant « facile » (donc à l’intensité de « l’endurance fondamentale »).
En effet, nous obtenons des gains de 12% de VO2max en 6 semaines pour des coureurs du niveau moyen de 3h45min donc supérieur au temps médian établi à 4h06’54 sur le marathon de Paris 2025 (https://www.marathons.com/save-the-date/marathon-de-paris-2025-les-chiffres-cles-dune-edition-record/
Car si à présent le niveau s’élève (plus de 2000 coureurs ont franchi le seuil des 3h au marathon cette année à Paris), il faut leur donner matière à progresser sans quoi ils iront sur du long, du plus long et encore du plus long comme une fuite en avant perpétuelle pour avoir l’illusion de progresser en capacité physique et au risque de se blesser alors que déjà les séances longues et lentes obligent à empiler les km pour un rendu qui fera mincir surtout.
Alors voici déjà le concepts clef, à défaut de recettes :
- Le facteur limitant du VO2max (qui est le fondamental de notre endurance…de vie, de notre qualité de vie (sans limite physique au quotidien) et de notre performance sportive (pour la majorité des sports mêmes ceux de vitesse), est la puissance musculaire (force * vitesse) ET le volume d’éjection systolique qui s’améliorent par des séances de fractionné courts en accélération positive et négative. En effet, il s’agit de ne pas ralentir, couper brutalement quand vous faites des fractionnés plus long voir schéma :
Exercice RA 101 – Séance Pyramidale de 4 minutes
Consigne :
Faire 4 pyramides de 4 minutes entre vitesse moyenne et vitesse dure :
- Monter progressivement en 2 minutes jusqu’à la vitesse dure,
- Puis redescendre progressivement en 2 minutes sans arrêt brutal.
⚠️ Important : Ne pas couper brutalement l’effort, car la phase de décélération favorise :
- le maintien du VO2max,
- le recyclage du lactate des muscles squelettiques par le muscle cardiaque.

Légende de la figure
- Gris clair : Échauffement (5 à 10 minutes)
- Orange clair : Vitesse « moyenne » pendant 3 minutes
- Orange foncé : Vitesse « moyenne » pendant 1 minute
- Rouge : Pyramide de 4 minutes (montée en vitesse → descente)
- Bleu clair : Récupération
Et si vous souhaitez mincir je vous donnerai le contenu précis de ce que nous avons prescrit comme séances à la sensation pour des personnes en surpoids de 40 ans et plus dans un prochain blog, notre article scientifique sur cette expérimentation ayant été accepté tout récemment. Mais ce long processus de remise en question, formulation des hypothèses, expérimentation, analyse des résultats, écriture, publication nécessite plus que de l’endurance fondamentale : LA FOI DU CHARBONNIER !

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