Quand les coureurs Kenyans m’ont fait prendre conscience de l’absence de liberté de chercher en paix en France !

Les années 2000 sont loin et pourtant…elles sont d’une actualité que je qualifierais de permanente tant les questions concernant leur domination « »génétique » revient en boucle à chaque fois qu’ils battent un record, qu’ils trustent les podiums.

Années 2000, les coureurs arrivent grâce à des « passeurs » que l’on qualifie de « managers » à l’époque.

Imaginez, des campings cars aménagés sommairement, ou des hôtels qui ne brillent pas d’étoiles, les transportent, les hébergent sur un tour de France qui ne fait pas rêver.

Celui des courses « à saucissons » qui rapportent surtout au manager qui leur laisse une prime qui les emplie de gratitude tant elle est immense à comparer de ce qu’ils peuvent espérer en restant courir après leur rêves au Kenya.

Agacée par des relents d’eugénisme qui coure aussi bien les publications scientifiques que les courses à l’échalote dont les vedettes bien de chez nous, suggèrent un classement à part pour ces étrangers hors normes qui …gènes.

Je décide d’affronter ce courant au moins sur le plan scientifique car j’estime que « Science sans conscience n’est que la ruine de l’âme »*.

Je persuade l’un de ces managers de tester physiologiquement tout son groupe de coureurs afin de lui permettre de détecter les meilleurs d’entre eux (je ne croyais pas si bien dire). Ce prétexte le séduit car il avait un esprit ouvert et il était un jeune manager qui pratiquait cette activité en plus de son travail et en espérait une reconversion proche. Il ne faisait pas partie du gotha des managers qui étaient rompus au « placement » de leur athlètes dans les grands meetings et marathons.   

Tous ces coureurs étaient de la même famille (cousins proches), du même village, mais suivaient des entraînements de deux types différents : le premier basé sur du volume kilométrique alors que le second l’était sur l’intensité et des fractionnés.

Le résultat était en accord avec mes hypothèses : le type d’entraînement déterminait le profil physiologique (voir le tableau extrait de notre publication dans une grande revue internationale), et je découvrais alors les capacités extraordinaires d’une jeune femme : Isabella Ochichi**, que je persuadais, avec l’accord de son manager, de passer de la route à la piste afin de révéler son talent qui se traduisit par une médaille d’argent aux J.O. d’Athènes en 2004, il y a 20 ans.

Elle me confiait que, pour elle, l’entraînement était une aimable plaisanterie en comparaison avec ce que devais parcourir sa mère pour aller chercher de l’eau à pied . Je pris en charge son entraînement jusqu’aux J.O. (voir la traduction de son WIKI**). Après elle décidait de se marier à un des coureurs du groupe et à fonder une famille au pays en utilisant son pécule (contrat Nike rémunérateur pour tout un village).

Ce fut une belle rencontre de femmes et je la remercie encore de m’avoir accordé sa confiance car elle avait persuadé ses camarades de porter le masque du K4 pour la VO2 sur le test de VMA sur piste (74 ml/min*kg pour elle). Sa petite taille était à l’opposé de sa détermination farouche à sortir de sa condition modeste et la réussite de ce peuple sur la course de fond est largement dû à un phénomène socologique, économique et à l’imprégnation de la culture anglo saxonne des frères qui ont enseigné dans ces collèges pétris de culture anglaise à « la chariot de feu » (lire cet article : https://www.cairn.info/revue-staps-2024-1-page-23.htm)

Un étudiant Lillois de l’époque, Manuel Schotté, s’attaquait à une thèse de sociologie STAPS (il est devenu un brillant Professeur sur les coureurs marocains. (https://journals.openedition.org/sdt/5402):
Manuel Schotté entend répondre à cette question à partir d’une étude de cas centrée sur les athlètes marocains qui, avec leurs homologues éthiopiens et kenyans, ont dominé les épreuves du 3 000 mètres steeple, du 5 000 et du 10 000 mètres dans les années 1980. Il explore la production de la hiérarchie sportive dans deux dimensions : celle du succès international d’une catégorie de coureurs, et celle de la réussite de certains individus au sein de cette population. L’analyse comporte un important volet biographique, qui rend compte, à partir d’une centaine d’entretiens réalisés avec des athlètes de différents niveaux, des étapes de l’apprentissage de la course à pied, des rapports aux exigences de l’entraînement intensif, de la fabrication d’un goût pour cette activité, des formes de socialisation spécifiques qui y sont associées. Les mécanismes de fabrication des coureurs et des talents sont également renseignés dans leurs dimensions historiques, institutionnelles, économiques, à partir d’un ensemble de matériaux diversifiés : immersion au sein d’un groupe de coureurs à Rabat, enquête ethnographique de longue durée conduite au Maroc, analyse du fonctionnement de l’Institut National d’Athlétisme qui accueille et forme l’élite marocaine, observation de l’athlétisme professionnel en France et repérage du rôle des réseaux relationnels et des acteurs spécialisés (managers, organisateurs de meetings, responsables de clubs) dans les parcours des athlètes. Les fondements empiriques de ce livre sont extrêmement solides et cohérents.

Je vous laisse méditer sur le fait que nous avons peut être dans nos rangs de la sélection olympiques, des coureurs qui viennent de ces contrés de course…

En tous les cas, à propos de la liberté de chercher, ayant fondé la première unité INSERM dédiée au sport santé et performance (UBIAE : Unité de Biologie Intégrative des Adaptations à l’Exercice) en 2007 avec les félicitations du directeur de l’INSERM de l’époque : Christian Bréchot, je devais me battre pour la conserver 7 ans plus tard car on m’intimait de travailler sur le gène de la performance, mon laboratoire étant également rattaché au génopole d’Evry.

Un délire s’ensuivit sur une demande de prendre de la salive des coureurs élites surtout Kenyans…et de préférences des vrais jumeaux.

Je rentrai en guerre contre cette injonction, cette entrave à ma liberté de chercher selon mon éthique, je ne dérogeais pas…et mon unité fermées, je décidais de fonder Billatraining pour auto financer mes recherches en toute liberté…

Mais cela me valut une suspension de 1 an, avec le risque d’être révoquée et donc de tomber au RSA car les fonctionnaires licenciés ne touchent pas le chômage…l’état ne cotisant pas !!

Je gagnais 2 ans plus tard, il y a 2 ans, en conseil d’état.

Alors restons vigilants sur les commentaires de ces J.O car nous n’avons toujours pas trouvé, même à grands coups de dollars 😂le gène de la performance, ni celui du courage de défendre la liberté de penser !!

*Cette citation provient d’une longue lettre édifiante que Gargantua adresse à son fils Pantagruel dans « La vie très horrifique du grand Gargantua, père de Pantagruel, jadis composée par M. Alcofribas abstracteur de quintessence. Livre plein de Pantagruélisme » (1532).

Extrait :

« Mais parce que selon les dire du sage Salomon, Sapience n’entre point en âme malveillante, et science sans conscience n’est que ruine de l’âme, il te convient servir, aimer et craindre Dieu, et en lui remettre toutes tes pensées et tout ton espoir ; et par une foi charitable, lui être fidèle, en sorte que jamais tu ne t’en écartes par péché. »

**https://en.wikipedia.org/wiki/Isabella_Ochichi

Isabella Ochichi

Isabella Bosibori Ochichi (née le 28 octobre 1979 dans le district de Kisii), originaire du Kenya, a remporté la médaille d’argent dans la finale du 5 000 mètres féminin aux Jeux olympiques d’été de 2004 à Athènes, en Grèce. Elle a terminé en 14:48.19, à environ 2,5 secondes de la gagnante, l’Ethiopienne Meseret Defar. (son record était de 14min37s).
En 1997, à l’âge de 17 ans, elle a participé à ses premières courses à l’étranger en France. Elle a été sélectionnée pour représenter le Kenya aux championnats du monde de semi-marathon de l’IAAF en 2001, où elle a terminé huitième. Elle a participé aux championnats du monde de cross-country de l’IAAF entre 2002 et 2006, son meilleur résultat étant des médailles de bronze sur course courte en 2002 et 2005.
En mars 2006, elle a remporté la même distance aux Jeux du Commonwealth. En avril de la même année, elle a remporté la médaille d’argent par équipe aux Championnats du monde de cross-country, après avoir terminé 10e dans la course courte.
Bien qu’au sommet de sa carrière, Ochichi a cessé de courir professionnellement en 2006. Elle est revenue à la compétition sept ans plus tard, en 2013. Lors de sa course de retour au semi-marathon de Prague, elle s’est classée troisième avec un temps de 1:09:21 heures (l’un de ses meilleurs temps). Elle a déclaré : « Après toutes ces années, je suis très heureuse d’être ici. Je m’attendais à bien courir, mais je ne pensais pas obtenir une troisième place ».[1] Elle a remporté le semi-marathon de Göteborgsvarvet en mai.[2] Ses débuts sur la distance du marathon ont suivi en octobre et elle a réussi à prendre la cinquième place du très médiatisé marathon d’Amsterdam, établissant son record personnel à 2:31:38 heures.[3]
Elle est mariée à David Maina, qui est également coureur et participe à des courses sur route. Elle est gérée par Gwenaël Vigot et entraînée par Véronique Billat.

3 réponses à “Quand les coureurs Kenyans m’ont fait prendre conscience de l’absence de liberté de chercher en paix en France !”

  1. Avatar de Cabrera Cristian
    Cabrera Cristian

    Tres intéressant

  2. Avatar de Heraclide
    Heraclide

    et que dire de cette folie ou l’Ego et ses peurs étriquent la pensée .

    https://www.arte.tv/fr/videos/117258-000-A/des-sportives-trop-puissantes/

    cette maxime n’est sans doute que trop vraie:
    science sans conscience n’est que ruine de l’âme (et des âmes).

    La question est : accepterons nous un jour qu’un record feminin puisse etre meilleurs ou proche de celui des hommes ?

     » ils ne savaient pas que c’était Impossible alors ils l’ont fait « 

    1. Avatar de Véronique Louise Billat
      Véronique Louise Billat

      merci pour le lien Vidéo Héraclide. Belle journée à toi

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