Quand les meilleurs du monde se défient sur l’Ironman de Kona

Un match imaginaire entre Léon Marchand, Tadej Pogačar et Eliud Kipchoge

Imaginez la scène : Hawaï, l’Ironman de Kona, la mer turquoise, la chaleur étouffante… Sur la ligne de départ, trois légendes du sport, chacune dans sa discipline : Léon Marchand, prodige de la natation et recordman du monde ; Tadej Pogačar, double vainqueur du Tour de France ; Eliud Kipchoge, le marathonien le plus rapide de l’histoire.
J’ai imaginé un scénario où ces trois champions possèdent le même VO₂max — 85 ml·min⁻¹·kg⁻¹ — mais avec des performances influencées par leur spécialité et par le coût énergétique de chaque discipline. Ce coût représente la quantité d’oxygène nécessaire pour se déplacer à une vitesse donnée.


Estimation du VO₂max
Pour Tadej Pogačar, nous avons estimé le VO₂max à partir de sa puissance au seuil FTP et d’une puissance moyenne sur 5 minutes (580 W) avec un coût énergétique de 10 ml·W⁻¹·min⁻¹, ce qui donne environ 85 ml·min⁻¹·kg⁻¹.
Pour Léon Marchand, l’estimation est basée sur son record du monde du 500 yards, correspondant selon le test de Lavoie sur 400 m à une VMA d’environ 7 km/h.
Pour Eliud Kipchoge, nous avons utilisé ses records sur 1500 m, 3000 m et marathon, avec des fractions d’utilisation de la VMA respectivement de 100 %, 98 % et 85 %.

Méthodologie
Dans leur discipline de prédilection, chaque athlète peut utiliser 80 % de son VO₂max avec un coût énergétique minimal (le meilleur du monde dans cette discipline). Dans les autres disciplines, cette fraction chute à 60 % et le coût énergétique est celui d’un athlète peu efficient dans cette activité. J’ai ensuite ensuite simulé l’impact d’optimisations technologiques réalistes.


VO₂max égal, économies différentes
Hawaï. La chaleur moite. L’océan Pacifique étincelant. Ligne de départ de l’Ironman de Kona.

Trois légendes : Léon Marchand (eau), Tadej Pogačar (bitume), Eliud Kipchoge (foulée). Trois moteurs. Trois économies. Un seul parcours.
Hypothèse
Nous plaçons les trois athlètes au même niveau de VO₂max (85 ml·min⁻¹·kg⁻¹). Mais nous laissons agir deux forces décisives : la fraction d’utilisation de ce VO₂max (80 % dans la discipline d’origine, 60 % ailleurs) et le coût énergétique (meilleur dans la spécialité, plus défavorable hors spécialité).

D’où vient ce calcul du VO₂max ?

  • Pogačar : à partir du FTP et d’une puissance moyenne sur 5 minutes (≈ 580 W), avec un coût en oxygène de 10 ml·W⁻¹·min⁻¹ (économie cycliste exceptionnelle).
  • Marchand : à partir du record du monde sur 500 yards (équivalent de VMA natation via le test de Lavoie ~7 km/h).
  • Kipchoge : à partir des records sur 1500 m, 3000 m et marathon (fractions de VMA ~100 %, 98 %, 85 %).
  • Scénario optimisé – Tableau de résultats

Bataille physiologique : moteur, batterie, glisse
Marchand glisse comme un requin : hydrodynamisme et efficacité technique. Pogačar sculpte l’air : chaque watt devient vitesse grâce à l’aérodynamisme. Kipchoge tend l’arc élastique à chaque appui : restitution d’énergie et économie mécanique. Hors milieu, la facture monte : la traînée de l’eau punit le coureur et le cycliste ; la course à pied consomme plus que le vélo sur la même distance.
Le coût d’un kilomètre
À distance égale : 1 km à vélo coûte environ 20× moins de calories que 1 km en natation, et ~4× moins qu’1 km en course à pied. Le classement final s’écrit donc autant dans l’air et l’eau que dans l’oxygène.

Analyse de sensibilité – Scénarios comparatifs
Que se passe-t-il si l’on modifie les fractions d’utilisation ou les coûts hors spécialité ? Le tableau ci-dessous synthétise les scénarios testés et leur impact sur le total Ironman.
Hypothèses de simulation Ironman
Hypothèse VO₂max (ml·min⁻¹·kg⁻¹) Fraction d’utilisation VO₂max Coût énergétique Objectif du scénario
A – Référence 85 pour tous 80 % dans la spécialité
60 % hors spécialité Meilleur du monde dans la spécialité
Moins favorable hors spécialité Point de départ neutre
B – Fraction homogène 85 pour tous 80 % dans toutes les disciplines Identique à A Mesurer l’impact de l’économie seule
C – Coût homogène 85 pour tous Identique à A Meilleur du monde dans toutes les disciplines Mesurer le gain technique pur
D – Techno-boost 85 pour tous 80 % dans toutes les disciplines Meilleur du monde partout Simuler l’effet maximal de la technologie
E – Optimisation combinée 85 pour tous 80 % partout Meilleur du monde partout Temps minimal théorique (technique + endurance optimales)

Ce match imaginaire montre que le vainqueur n’est pas forcément celui qui a le plus gros moteur, mais celui qui sait transformer chaque watt en vitesse utile tout en limitant les pertes énergétiques. Le travail sur le coût énergétique est donc essentiel, et la technologie y joue un rôle déterminant. Malgré une planète recouverte à environ 71 % d’eau, notre physiologie est terrienne. Sur la même distance, l’eau est énergivore, l’air est domptable, le sol rend l’élastique. L’Ironman révèle cela : le vainqueur n’est pas seulement celui qui a le plus gros VO₂max, mais celui qui paie le moins pour chaque mètre parcouru.

Le rôle de la technologie
L’aérodynamisme, l’hydrodynamisme et la restitution de l’énergie élastique par les chaussures à plaque carbone jouent un rôle majeur dans la performance. Pour le projet Sub2h au marathon, même le positionnement des lièvres avait été optimisé en soufflerie. On imagine la part de la technologie à vélo : cadres profilés, roues lenticulaires, positions extrêmes en contre-la-montre.
En natation, les combinaisons haute performance permettent de réduire la traînée et donc de limiter le déficit des cyclistes et coureurs. En course à pied, les chaussures à plaque carbone permettent de restituer plus d’énergie élastique et d’augmenter le rendement mécanique.
Et surtout, ne pas oublier d’optimiser sa force, sa puissance musculaire afin de ne pas se faire une contracture aux ischio-jambiers ou pire un claquage, avec les chaussures en carbone pour gagner du temps et rester blesser une à plusieurs semaines avec un VO2max qui ne peut résister au désentraînement que 3 semaines tout au plus !
Concernant le vélo il faudra y consacrer du temps de travail afin de gagner les milliers d’euros pour une machine de guerre aux frottements et à la gravité.
Du temps à ne pas s’entraîner !
Toujours le même dilemme : faut il perdre sa vie à la gagner ?
En tous les cas la règle en sport est de gagner du temps en s’entraînant dans tous le registres d’intensité afin d’être prêts à chausser et monter sur les chaussures ou le vélo de vos rêves.
Pour nager ? un conseil, commencer jeune, très jeune ! et avec un bon technicien qui ne se contente pas de vous faire bouffer des carreaux surtout si votre objectif est de gagner un Iron man dans le véritable milieu aquatique avec des vagues et peut être même (encore ?) des poissons.
Oui car la bonne nouvelle pour la fin, est que si vous êtes un triathlète un peu moyen sup dans les trois locomotions natation, vélo, course, vous allez battre ces titans du sport !!

5 réponses à “Quand les meilleurs du monde se défient sur l’Ironman de Kona”

  1. Avatar de Yves Levasseur
    Yves Levasseur

    Très intéressant
    Merci

    1. Avatar de Véronique Louise Billat
      Véronique Louise Billat

      merci pour ton commentaire Yves. A présent Kipchoge qui, décidemment, cherche des défis en ultratrail !

  2. Avatar de walter bonnal
    walter bonnal

    Pas mal du tout…
    Intéressant..
    Bravo

    1. Avatar de Véronique Louise Billat
      Véronique Louise Billat

      merci et à présent une petite fable reprenant Kipchoge qui, décidemment, cherche des défis !

  3. Avatar de Jef Devaux
    Jef Devaux

    Intéressant et plein d’idées pour les entraineurs de disciplines hybrides!
    amicalement
    jef

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